Donner

Je trouve notre XXIème siècle émotionnellement survolté mais affectivement mièvre et intellectuellement mou.

Les réseaux sociaux reflètent bien cet état des choses. Inutile de revenir ici sur ce qu’ils sont dans le pire des cas. Dans un des meilleurs cas, Facebook nous fait dire : « Je vous propose de m’aimer et je vous aime pour que vous m’aimiez ».

Je ne prétends pas échapper à ces égards réciproques. J’apprécie toutefois  cette réflexion de Vincent La Soudière (1939-1993) trouvée dans son recueil d’aphorismes Brisants publié à titre posthume :

Ecrire est une chose. Se faire publier en est une autre. Un abîme sépare ces deux états de la pensée. Je distingue, derrière le fait de publier, un fort besoin des autres, de quantité d’autres – rarement donner, se donner et se perdre.

Pour découvrir ce poète intraitable et remarquable :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Vincent_La_Soudi%C3%A8re

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11 réponses à Donner

  1. le guennec dit :

    Où donc trouvez-vous tous ces énergumènes ? Je vais tâcher d’y aller voir cette après-midi.

    • ndecourson dit :

      Pour vous allécher : ce poète s’intéresse à “l’esprit d’enfance”, car “l’enfant va droit au but (…) Une sorte de grâce qu’il n’a pas méritée et que le seul entêtement ne peut expliquer”.

  2. Charles dit :

    “Je distingue, derrière le fait de publier, un fort besoin des autres, de quantité d’autres”
    Peut-être aussi le désir insensé de laisser une trace, d’accomplir une œuvre, ou même sa vie…
    Quant au “besoin des autres”, est-ce seulement un besoin ? C’est une condition nécessaire à la vie humaine. Sans les autres pas de vie humaine. Chaque fois que l’on a tenté de se passer des autres, on a sombré dans la folie ou la destruction. C’est insupportable peut-être, mais c’est ainsi, il faut s’en arranger.
    Voici ce que m’inspire ton texte.
    Je note Vincent La Soudière, un encore.

  3. Charles dit :

    J’oubliai : publier et écrire.
    On entend beaucoup ces termes; Mais Vincent La Soudière a bien raison : publier et écrire sont deux activités sans rapport.
    Hélas, tant de gens se disent “possédés par l’Écriture”, alors qu’ils pensent surtout à publier et à la gloriole qui va avec (et aux sous qui éventuellement viennent avec).
    A cette “Sainte Écriture” chez des gens en général athées de nos jours !

  4. robinet dit :

    Chère Nathalie, je découvre grâce à toi (et ce lien que tu nous donnes à Wikipédia) ce poète douloureux, inquiet, incapable de trouver la paix ici-bas, délivré seulement par sa mort tragique. Je vais me procurer “Brisants”. Merci pour cette découverte.
    Un abrazo

    • Il y a chez lui une recherche spirituelle constante que malheureusement, contrairement à toi (ou à Henri Michaux, par exemple) il n’a pas pu… je ne sais pas quel infinitif employer…
      Jean-Yves Masson s’est intéressé à lui aussi, je crois.

  5. marie-paule Farina dit :

    je m’aperçois même si ça me déplait de le reconnaitre que tous mes textes ont pour finalité de réparer une injustice comme si je me prenais pour Don Quichotte et partais pourfendre les méchants incapables de voir toute l’ironie et la tendresse d’un Sade ou même d’un Flaubert. Moi aussi j’ai sûrement lu trop de romans de chevalerie et rentre à la maison pleine de bleus et de bosses et surtout tout à fait consciente du risible de ma démarche: prendre Sade et Flaubert, ces monuments de notre littérature, pour des veuves et des orphelins dont le sort dépendrait de ma minuscule plume et ma minuscule audience. Ridicule.

  6. le guennec dit :

    Au fond, est-ce que le désir de publier ne fait pas contrepoids à la névrose de l’écrivain.e ? Publier sans avoir rien à dire fait choir d’un côté; écrire sans vouloir publier fait s’effondrer de l’autre. C’est le signe d’une pathologie. C’est réclamer l’ordonnance et refuser le médicament.
    J’ai connu une femme qui écrivait à longueur de journée et laissait à ses héritiers le soin de traiter cette pléthore de texte.
    Car le texte qui n’est pas lu, comme les voix qui clamaient dans le désert, est une manifestation de l’absurde.

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