(Voir, sur ce recueil du poète Antoine Emaz, mon billet du 6 février que celui-ci prolonge)
La métaphore marine se file discrètement tout au long du livre au moyen du motif de la barque. Les vers de la suite du recueil, datés cette fois d’août 2013 à juillet 2015, ne manquent pas de dire la limite qu’impose un corps souffrant, avec le mètre bref et l’énonciation impersonnelle qui caractérisent la poésie d’Antoine Emaz : la barque corps / ne porte plus que mal
ou : la carcasse craque / vieille branche / vieille barque
Quelques morceaux de prose envisagent un naufrage :
abandon de la place retrait écart et corps à la dérive comme un canot vide après naufrage ou coup de dés en trop
Dans les pires moments, la confiance dans les mots semble vaciller : vieux/ les mots/aussi (…) on ne croit plus qu’il y a la mer/ au bout du coquillage
Ils se retirent, marée basse clapotis de mots, avant de revenir comme des galets roulés, dans une oscillation régulière entre découragement et désir qui continue vaille que vaille à donner vie au poème, illustrant cette note d’Emaz dans le livre Cuisine : “Le poème est là, dans son mouvement de langue innervée par vivre, et il ne demande ni explication ni commentaire.”