Les mouettes grièches arrivent par familles à marée descendante, se poussant et braillant car « quien no chilla no mama » (qui ne braille pas ne tète pas). Les plus hardies piquent toutes les coquilles dans les criailleries et les ailes furieuses des moins hardies.
Une avocette élégante se pose dans une flaque. Tout de suite elle fait la différence : une ballerine dans une bande de poissardes. Tranquille, elle avance son long cou dans la flaque, pêche, gobe et s’envole.
Quand je regarde les mouettes je cherche une avocette élégante, ou à défaut une mouette sage, et on se parle en alexandrins.
Assise sur un rocher je dis à la mouette sage : « Cette île est un îlot mais cet îlot est mien. »
La mouette sage me répond, la bouche pleine : « Cett’ mer est une flaqu’ mais c’est mon lieu de pêche. »
Elle prend une coquille fermée dans son bec, s’élève à la verticale, la lance sur la plage, redescend, se pose, la reprend, s’envole, lance, redescend, se pose…
et la coquille s’ouvre
« Cent fois sur le galet jetez le coquillage »
me dit, avant de s’envoler, ma mouette sage.