Le journal Le Parisien se demande aujourd’hui : “Pourquoi l’omerta a tant duré ?” “Pourquoi les enseignants n’ont-ils pas parlé ?” Les enseignants ont très souvent parlé, ils n’ont jamais cessé de parler, les enseignants savent ce qu’est parler, et la question du Parisien donne la mesure de l’indifférence générale à cette parole.
Tirés d’Eclats d’école (Le Lavoir Saint-Martin, 2014), quelques riens qui ont constitué l’air du temps de 1995 à 2005 et préparé les années qui ont suivi. Les faits rapportés ici sont vrais.
Escarmouche 1
Oui, le professeur de la salle d’à côté a vu quels élèves de la terrible 3ème 5 ont cassé, dans l’escalier, la jambe du souffre-douleur de la 6ème 3. Indigné, il promet à Franca : « Oui, je le dis de ce pas à la Direction, cette violence est intolérable ».
Quelques jours après, le professeur de la salle d’à côté répond à Franca : « A la Direction ? Quel escalier ?… Ah, mince, c’est vrai ! Mais j’aurais du mal à les reconnaître, tu sais ? »
Le professeur de la salle d’à côté n’est pas sous l’emprise d’une menace de grand frère, il respire la bonne foi. Il a sincèrement oublié qu’il a vu, et oublié qu’il a dit avoir vu. Il a oublié aussi que le blondinet de la 6ème 3 s’appelle Yaël Levine. Tant d’autres incidents ont occupé le devant de la scène que tout s’est noyé.
Escarmouche 2
Madame S. tapote le dos d’un élève de cinquième pour le faire entrer dans la salle de cours. L’élève se retourne : « Ne me touchez pas, vous êtes impure ». La Direction du collège n’ayant pas réagi à son rapport, Madame S, qui en avait déjà gros sur le cœur, a donné sa démission.
Le papa d’Octavio
Franca et Madame la Conseillère Principale d’Education reçoivent le père d’Octavio. L’année n’a pas bien commencé : retards, bavardages, refus de se déplacer, provocations diverses. Après la mise en garde, il faut envisager une sanction. Le père supplie : — Je vous en prie, pas trop sévère, c’est un garçon très sensible qui a souffert dans sa petite enfance.
Quand il n’est pas content, Octavio bat son père. Il lui a cassé le nez l’autre jour avec une télécommande.