Avec un tableau de Juan Sánchez Cotán

Juan Sanchez Cotan, “Fenêtre, fruits et légumes”, vers 1602. Madrid, collection Abello.

Comment se fait-il qu’en entrant dans une salle d’exposition notre œil soit immédiatement attiré par telle chose plutôt que telle autre ? Comment se fait-il que dans une exposition du Louvre appelée « Les Choses », je me sois arrêtée sur ces citrons, ces carottes et ces choux du peintre tolédan Juan Sánchez Cotán contemporain de Cervantes (1560-1627) ?

Mon attention a peut-être été retenue par tout ce que le tableau ne contient pas et que des tableaux voisins contiennent. Ici, pas de fond de paysage, pas de Christ visitant Marthe et Marie, pas de symbole des divers sens, pas de composition décorative dans un compotier, pas de décomposition signalant une vanité. Les légumes sont suspendus par un cordon on ne sait pas à quoi. Le mot « fenêtre » figure dans le titre mais c’est tout.
Ces choses sont là, regardées avec attention, peintes avec amour. Chacune existe avec son grain et sa lumière propres. Elles sont là frontalement, comme un enfant qui vous regarde droit dans les yeux.

(Au risque de susciter un « c’est pas ça » de la part de gens avertis, j’ajouterai que cette simplicité et cette rigueur de composition me font penser à Morandi ou à Juan Gris.)

Une biographie Wikipédia m’informe que deux ans plus tard, en 1604, Sánchez Cotán, quadragénaire, prononçait ses vœux de moine et partait pour la Chartreuse de Grenade où il a fini ses jours une bonne vingtaine d’années plus tard.

 

Ce contenu a été publié dans Non classé. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

3 réponses à Avec un tableau de Juan Sánchez Cotán

  1. robinet dit :

    ” son grain et sa lumière propres.”
    N’est-ce pas ce qui nous retient : l’unique, la révélation d’un regard qui nous fait entrer dans sa contemplation? Dans ce tableau il y a le silence et le vide qui magnifient ces choses élémentaires de la vie. Oui : Morandi et Juan Gris ; la même épure, la même rigueur qui abolit les “vanités”. Je ne connaissais pas ce peintre-mystique. Merci de nous le dévoiler.
    Un abrazo

  2. Tania dit :

    Cette belle nature morte me rappelle une exposition sur ce thème à Bruxelles, il y a quelques années. Une autre peinture de Sánchez Cotán figure au début du billet que je lui avais consacré, pour info. http://textespretextes.blogspirit.com/archive/2018/03/26/choses-sur-une-table.html

Répondre à Tania Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *