Dans Les Confessions, Rousseau parle du bonheur qu’il a éprouvé avec Madame de Warens à la maison des Charmettes en disant que ce bonheur n’était “dans aucune chose assignable”, mais “tout en moi-même”.
Certains lieux plus que d’autres appellent cette intériorité heureuse. J’ai à Paris sous les toits une chambrette que nous avons baptisée Zeno en mémoire du livre d’Italo Svevo La Conscience de Zeno. Je ne chercherai pas à la décrire car elle n’a pas grand-chose de plus que toutes les chambres de bonnes parisiennes, sauf deux fenêtres ouvrant sur de petits balcons en zinc.
En ce moment, Zeno tremble sous les travaux de la chambre d’à côté, « boum, boum, boum » ; plus les crissements de l’échafaudage de l’immeuble d’en face ; plus les bruits de grue, de gravats et de matériaux dans la rue que la Ville de Paris transforme en voie piétonne.
Et pourtant, magiquement, Zeno reste ce lieu où je peux être “tout en moi-même”.
Un livre de Tonino Guerra semble attendre tranquillement d’être ouvert. Je lis :
Certains jours je fixe longtemps
quelque chose, ce peut même être un verre
jusqu’à ce que je ne le voie plus
et que je sois comme une bulle de savon
qui vole qui sait où !
“Tout en moi-même”, jusqu’à l’envol de “moi-même”.
“Tout en moi-même”, jusqu’à l’envol de “moi-même”. C’est beau, irrésistible ! D’autant plus quand on revient, comme moi, d’un aller-retour à Paris, où j’ai cru que la foudre me tombait sur la tête… Avec quel bonheur, j’ai retrouvé mes esprits avec mon village! Trop vite abasourdi, j’en oubliais Zeno et ce qui est plus grave jusqu’à la conscience élémentaire que je peux avoir de moi. J’aime Paris cependant et y rêver parfois comme Mimi dans sa mansarde d’Opéra. J’y retournerai peut-être avec le froid pour y retrouver ce que j’aimais tant… avant de m’envoler pour de bon !
Disgusto pasajero con un abrazo