Sur la Florence d’Annick Farina

Quel touriste studieux voit-on encore consulter son long guide vert ou son gros guide bleu quand tant d’applis font si bien l’affaire ?

Mais :


La collection Villes en v.o. à laquelle appartient le livre d’Annick Farina n’est pas un guide quelconque. C’est un voisin de table joyeux, ou un livre de chevet que l’on aime trouver le soir en rentrant chez soi.

Ses entrées sont alphabétiques : à chaque lettre correspond un mot-clé pour la ville, avec des explications illustrées par un ou plusieurs textes courts d’artistes, poètes, romanciers, philosophes qui sont donnés en « v.o », puis en français. Certaines entrées sont des mots qui ont la saveur de la langue de la ville, comme la première, Afa, onomatopée désignant la chaleur humide qui caractérise Florence en été. Non loin de là, une entrée plus savante, Arti del disegno – expression rassemblant les trois arts de l’architecture, de la sculpture et de la peinture – est accompagnée d’un texte de Michel-Ange.
Ce guide amoureux suscite le désir de voir et d’entendre autrement, tout en donnant une résonance à ce que l’on a vu et entendu dans la journée.

Dôme de la cathédrale de Florence, Détail de l’Enfer tiré du blog “Trace ta route”.

L’article Inferno évoque surtout, bien sûr, Dante, avec la citation de quelques vers de la Divine Comédie (XXVI, 1-3) :

Réjouis-toi, Florence, puisque tu es si grande
Que sur terre et sur mer tu déploies tes ailes,
Et que ton nom se répand par l’enfer !

En relisant ces vers, je me revois marchant dans la galerie supérieure de l’immense dôme  de la cathédrale, sous les sabots d’un taureau furieux ou entre les jambes d’un damné…

Un autre jour, je regardais dans un cloître des nuages qui, malgré le petit vent, restaient immobiles sur un ciel bleu pastel, quand j’ai eu l’impression que le temps s’était arrêté comme sur les peintures et que je resterais là éternellement. Seuls des passages d’hirondelles, de temps en temps, me rappelaient à la réalité. Le soir, l’article Cielo me donnait des phrases émerveillées de Claudel et d’importantes explications sur Galilée et  les mouvements des corps célestes.

Détail du tableau “Una burla del Piovano Arlotto” de Baldassare Franceschini, vu au palais Pitti.

Je me suis fait aussi un ami : Porcellino. Ce sanglier de bronze devant lequel on passe et repasse crache de l’eau sur le Mercato Nuovo, au centre de la ville, et on en trouve ici et là des copies. Annick Farina cite à son sujet un très joli conte d’Andersen intitulé Le Sanglier de bronze.

Un orphelin  déguenillé erre dans Florence, jusqu’au moment où il arrive sur le marché  près de Porcellino qu’il serre dans ses bras :

L’enfant grimpa sur le large dos du brave porc, qui l’avait abreuvé, s’y installa à son aise, reposant sa tête bouclée sur celle de l’animal, et, sans qu’il y prît garde, il s’endormit d’un profond sommeil.

Minuit sonna ; l’animal tressaillit et dit distinctement : “Petit, tiens-toi bien ; je vais prendre mon élan”. Et en effet il partit, et ce fut une singulière course.

Porcellino, original en bronze du musée Bardini

Peut-on imaginer meilleure lecture avant de s’endormir ?

 

 

 

 

 

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4 réponses à Sur la Florence d’Annick Farina

  1. farina marie paule dit :

    Formidable! Annick qui regrettait de n’avoir pu vous servir de cicerone du fait de son absence de Florence vous aura quand même un peu guidés 🙂

  2. Dany Pinson dit :

    Mi fate desiderare di tornarci, Natalia !

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